Loire-Atlantique La méthanisation permet à un éleveur de canards de chauffer ses bâtiments

Jean-Pierre Chauvin, éleveur de canards à Pornic et engagé en matière d'énergie renouvelable, évoque les raisons qui l'ont incité à construire un méthaniseur dans son exploitation. Entretien.

Pourriez-vous décrire votre exploitation ?

J'étais installé en vaches laitières et canards. Ensuite, j'ai eu des veaux de boucherie  et depuis 2010, je suis passé uniquement aux canards. L'élevage concerne 26 000 places de canards. Un troisième bâtiment est en cours de construction en parallèle de l'unité de méthanisation. Je pourrai ainsi accueillir 39 900 canards dans l'exploitation.
En parallèle, j'ai 146 ha dont 110 ha de céréales. Ils sont travaillés à façon par un tiers pour que je puisse me consacrer aux canards. Le reste est en herbe, à quelques kilomètres de Pornic, à La Bernerie. L'élevage de canards fonctionne toute l'année, avec une organisation en décalage de quinze jours pour optimiser la méthanisation. Les canards sortent à douze semaines.

L'élevage de canards implique des odeurs qui indisposaient le voisinage. J'ai beaucoup travaillé avec les associations pour trouver un compromis à ce sujet.
Je valorise le lisier avec un épandage sur les cultures. J'importe également du fumier de bovins d'un éleveur bio voisin et lui me reprendra du digestat de la méthanisation pour améliorer les qualités agronomiques de son sol.
Enfin, pouvoir faire de la cogénération est un plus. En effet, le biogaz permet de chauffer les canardiers à 22 °C pendant huit semaines. C'est un réel confort pour l'animal car, auparavant, je devais faire un compromis entre le bien-être animal et le prix du gaz, en chauffant uniquement pendant six semaines. Il y aura deux aérothermes dans le bâtiment pour allier récupération des calories du bâtiment et valorisation des calories de la méthanisation. Ce sera également un réel gain électrique.

C'est une petite unité de méthanisation avec double fosse et double paroi, et avec circulation en vases communicants liquide-gaz grâce à des trappes au sol. Le brassage est limité à deux turbines car le procédé permet un brassage naturel. La bâche recouvre uniquement un tiers du toit. Sur le reste, c'est une plate-forme rectangulaire. Le digesteur fait 800 m³ et la fosse de digestats 2 200 m³. Nous avons fait le choix, avec le bureau d'étude Bio4Gas, d'une membrane nénuphar sur le digesteur. C'est une grande première dans la région Pays de la Loire ! Ce procédé permet d'évacuer l'eau de pluie et de récupérer les excédents de gaz.

Cela a été compliqué. Le projet voit le jour aujourd'hui mais est à l'étude depuis 2009. Tout d'abord, le zonage de la parcelle ne permettait pas les travaux d'agrandissement. Il a fallu faire une mise en compatibilité des documents d'urbanisme. Ce fut une longue attente et parfois même décourageant au regard des dossiers à produire et, surtout, des délais administratifs.
Je ne voyais pas d'avenir entre le problème d'odeurs, les attentes des associations et la situation de l'exploitation à 3 km de la plage, sans la méthanisation. J'ai fait énormément de concertations et d'efforts d'intégration de l'exploitation dans le paysage pour répondre aux exigences de la Commission des sites. C'est un coût supplémentaire pour le projet et cela aurait pu être un frein pour les banques et assurances de prêts. Heureusement, elles m'ont suivi et Bio4Gas se charge de tous les montages de dossier. C'est un réel avantage.