Ce début de campagne culturale trop arrosé engendre divers risques dans les parcelles.
La pluviométrie entre septembre dernier et fin janvier a battu des records : jusqu’à 617 mm en Sud-Vendée.
L’engorgement temporaire provoqué maintient une nappe perchée qui augmente les risques de ruissellement et de pollution des émissaires (coulées de boue, envasement et eutrophisation des cours d’eau), production de gaz à effet de serre (CO2, NH3, N2O, CH4 en situation extrême).
Cette situation peut engendrer des réactions en chaîne : la faible vitesse de réchauffement du sol pourra retarder la date des semis et la levée des cultures.
Un tassement généralisé entraînant une diminution de la porosité, pourra réduire le développement du système racinaire des plantes et l’absorption des éléments nutritifs.
Elles seront plus chétives et plus sensibles aux maladies, et laisseront des espaces libres aux adventices.
L’activité biologique en sera pénalisée (réorientation des populations microbiennes) et la minéralisation des matières organiques perturbée, aboutissant à une mauvaise humification des MO et une mauvaise minéralisation de l’humus.
Les cycles des éléments nutritifs carbone, azote, soufre… seront modifiés et pourront limiter le potentiel de rendement.
En sols hydromorphes, sols qui manifestent régulièrement des excès d’eau, les cycles du phosphore et du soufre, calqués sur celui du carbone sont aussi perturbés : les plantes rougissent par manque de phosphore et les résidus organiques produisent du sulfure d’hydrogène (H2S) à odeur d’œuf pourri.
L’azote est bloqué sous forme organique et l’azote nitrique lixivié (ou lessivés), réduit sous forme ammoniacale contribue à l’effet de serre en émettant du protoxyde d’azote gazeux (N2O).
L’activité des micro-organismes est ralentie et l’évolution des matières organiques modifiée : la minéralisation est stoppée, une partie est perdue sous forme soluble, tandis que les fractions ligneuses sont « fossilisées ».
La terre prend une couleur grisâtre ou noirâtre.
Ainsi, l’impact des tassements est donc multiple : destruction de la structure de surface, réduction de la porosité, ralentissement de la circulation de l’air et de l’eau, asphyxie induite, diminution du drainage interne…
Avoir le courage d’attendre
La règle d’or sera d’avoir le courage d’attendre et d’entrer dans sa parcelle lorsque le sol sera parfaitement ressuyé (la terre tache les doigts sans coller). Il faudra sans doute patienter pour faire ses épandages ou ses semis car le compactage peut se répercuter à plus de 40 cm, bien au-delà des possibilités de correction offertes par les outils de décompactage.
Le travail profond comme un labour n’est pas toujours indispensable.
L’abandon du labour fera augmenter le taux de matière organique en surface et diminuer à terme la densité apparente des cinq premiers centimètres (fourchette : 3 – 8 cm).
Il réduit du même coup, l’érodibilité des sols.
Avec un taux de matière organique qui grimpe de 1,7 à 3,4 % en surface et une densité qui passe de 1,35 à 1,1, les cinq centimètres de surface s’enrichissent de 8 t d’humus. Un gramme d’humus pouvant absorber 5 à 7 g d’eau, la surface stocke environ 50 cm2 d’eau de plus que la couche non travaillée située juste en dessous.
Cela explique l’effet d’ « éponge des sols » en semis direct et leur réchauffement souvent plus lent au printemps (malgré leur couleur plus foncée).
Pour les outils de préparation du sol, il faudra limiter l’utilisation de la prise de force ou adapter sa vitesse de rotation pour les reprises dans les sols fragiles (limons et sables), éviter de faire trop fin en sol limoneux pour limiter les risques de prise en masse et de battance.
L’utilisation des pneus basse pression est requise.
Dans tous les cas, il est intéressant d’aller observer le sol avant implantation et préparation afin de se rendre compte des conséquences de cet épisode pluvieux qui peuvent être variables selon les sols et l’historique des pratiques.
Afin d’adapter au mieux l’itinéraire technique à suivre
Pour un maïs par exemple, il faudra veiller à ne pas avoir de compactions présentes sur les 25 cm.
Pierre Mulliez, chambre d’agriculture Pays de la Loire