En Pays de la Loire, 47 captages d’eau potable vont devoir engager des actions pour protéger la ressource. Entretien avec Catherine Schaepelynck, élue à la chambre d’agriculture de la Sarthe et responsable du dossier Eau à la chambre régionale d’agriculture.
Suite aux Assises nationales de l’eau de 2019, les préfets de région ont été chargés d’établir une stratégie régionale sur les captages dits prioritaires. Ces captages ont été identifiés au Grenelle de l’Environnement de 2006 puis à la Conférence environnementale de 2013 au regard de leurs concentrations en nitrates et/ou pesticides. 47 sont concernés dans notre région soit 10 % de la SAU (voir carte). La chambre d’agriculture a été associée à l’élaboration de ce document d’orientation.
Quelles sont les conséquences concrètes de cette stratégie pour les agriculteurs situés dans l’aire d’alimentation de ces captages ?
Catherine Schaepelynck : La plupart de ces captages sont concernés par une problématique de pesticides. La question des produits phytosanitaires devient prégnante car les producteurs d’eau potable retrouvent des métabolites dans les eaux distribuées sans pouvoir les traiter suffisamment. Je pense notamment aux produits de dégradation du S métolachore (herbicide sur maïs). Par ailleurs, il y a toujours des captages avec un problème de nitrates. On voit donc se mettre en place sur certains captages des plans d’actions via des contrats territoriaux, pour d’autres des dispositifs Zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE) avec des actions volontaires dans un premier temps mais pouvant devenir obligatoires dans des délais assez courts. Les mesures peuvent concerner un pourcentage de surface à désherber mécaniquement ou encore la réduction des IFT. On peut voir aussi des limitations d’utilisation de certains produits y compris de la part des fabricants : c’est le cas du S métolachlore. Les effets peuvent également porter sur le foncier avec des réflexions appuyées de certains syndicats pour avoir la maîtrise du foncier et, par voie de conséquence, le type d’agriculture sur ces parcelles (par exemple : système herbager ou à faible intrant - agriculture biologique).
Quels sont les messages que vous avez portés lors de l’élaboration de cette stratégie ?
Nous avons rappelé que les agriculteurs étaient conscients de l’enjeu et que les élus des chambres avaient d’ailleurs pris des engagements via la stratégie Eau validée en janvier 2020 avec un volet dédié aux captages. Nous avons indiqué quels devaient être les préalables et les conditions à respecter de notre point de vue pour que les objectifs de cette stratégie soient atteints, nous permettant de sortir de cette liste de captages prioritaires. Avant tout, pour nous, il faut privilégier des plans d’actions volontaires hors d’un cadre réglementaire et nous y sommes attachés. Le programme doit être co-construit avec les agriculteurs concernés pour prendre en compte les contraintes locales et techniques et engager le maximum d’entre eux. À titre d’exemple, il peut y avoir des impasses techniques liées à une situation météorologique qui oblige au recours de produits phytosanitaires. Il faut, en même temps, garantir le financement des modifications de pratiques et de systèmes sans quoi la viabilité des exploitations sera compromise. Nous avons rappelé l’espoir que nous mettions dans l’outil Paiement service environnemental (PSE) qui se heurte malheureusement au problème juridique des aides directes aux agriculteurs quand il s’agit de financement public. Enfin, nous avons insisté sur la prudence à avoir avant d’activer certains outils fonciers sur les captages en demandant à être associés à la réflexion. Notamment quand il s’agit de l’acquisition de terres par la collectivité et par la voie de la préemption, à n’envisager, selon nous, qu’en dernier recours.
Marie-Laure Rousseau chambre d’agriculture Pays de la Loire